Annette Petavy Design – Bulletin mars 2012 – Travailler avec un écheveau unique (1ère partie)

Je voulais vous parler de mes réflexions et idées autour d’un petit projet – un projet travaillé avec un écheveau réellement unique. La logique peut être appliquée à n’importe quel projet pour lequel on n’a qu’une quantité limitée de fil – il s’agit juste d’un exemple pour vous inciter à faire vos propres créations.

J’ai décidé de diviser le sujet en deux parties – la deuxième sera publiée dans le prochain bulletin.

Je pense que je ne suis pas la seule à qui cela est arrivé – l’incapacité de résister au charme d’un seul, merveilleux écheveau de fil. Cette fois-ci, il s’agissat de ce très beau fil filé main :

yarn

Filé par Fanfrelaine en maco mérinos, une laine incroyablement douce en provenance d’une petite ferme dans les Alpes de Haute Provence – environ 180 m et 72 g de splendeur colorée.

J’avais donc cette quantité de fil limitée, et je voulais en faire quelque chose. Je savais que ce « quelque chose » devait se porter autour de mon cou, pour profiter pleinement de la matière très douce et chaude.

ball

Pour réussir un projet dans un fil multicolore avec des répétitions de couleurs très courtes et des coloris très contrastants, il s’agit de bien choisir son point. Le point choisi peut adoucir ou souligner le caractère du fil, et le résultat final sera très différent suivant ce choix initial. J’ai donc commencé à échantillonner!

swatch1

L’échantillon montre l’évolution de mes idées, du bas vers le haut. Ma première idée était d’utiliser le point granite. Souvent, quand on travaille avec ce type de fil, il est recommandé d’utiliser un point qui fragmente les couleurs. Je me disais que le point granite, avec ses petites mailles et ses rangs en quinconce aurait cet effet.

granite stitch

D’une certaine manière, cela a bien fonctionné. Dans un projet avec des rangs plus larges, l’effet de rayures de l’échantillon aurait été moins évident, car un rang aurait contenu plus d’une couleur. Et l’effet fragmenté, un peu « brouillé », y était.

Toutefois, j’ai décidé que ce n’était pas ce que je voulais. Ce qui m’a attiré chez ce fil au départ était d’abord sa douceur, mais aussi les joyeuses tâches de couleurs vives. Je me suis rendue compte que je ne voulais pas mélanger les couleurs et adoucir leur impact. Je voulais que mon projet fini reflète la joie que j’ai ressenti quand j’ai vu les éclats de couleurs intenses dans le fil.

Alors, comment faire pour garder les touches de couleurs ensemble plutôt que de les fragmenter? En utilisant de plus grandes « unités », où plusieurs mailles ensemble forment une entité visuelle. Des noppes ou mouchets,  comme 3 brides écoulées ensemble piquées dans une même maille, pouvaient être une bonne idée. Cependant, ce genre de point consomme beaucoup de fil, et j’en avais une quantité assez limitée. J’ai donc choisi d’utiliser des coquilles.

shells

A mes yeux, ceci était un point beaucoup plus à même de refleter correctement la « personnalité » du fil. Les couleurs dans le fil formaient des « taches » de couleur dans le travail, et l’impact visuel était bien présent.

Mais j’avais le sentiment que ces coquilles étaient un peu trop denses et lourdes. C’était d’autant plus le cas que le fil était un peu irrégulier, ce qui est tout à fait normal pour un fil mèche filé à la main. A certains endroits, le fil était assez épais, et les coquilles étaient simplement trop denses.

J’ai donc voulu essayer une variation de la coquille, où j’ai gardé sa forme générale, mais l’ai allégé en remplaçant deux brides dans chaque coquille par des mailles en l’air.

airy shells

Et là, j’ai senti que j’avais trouvé mon point. La forme de la coquille y était bien, mais avec moins de brides et quelques petits arceaux le résultat était nettement plus léger. Le travail était aussi plus souple.

Voilà, j’avais trouvé mon point. Maintenant il me fallait savoir ce que je pourrais faire avec ce point, avec mon idée générale de ce que je voulais et avec le fil disponible. J’ai défait mon échantillon avec beaucoup de soin, et j’en ai refait un autre.

master swatch

Ceci est ce que j’appelle « l’échantillon maître ». J’en fais (au moins) un pour chaque modèle que j’invente. Normalement, l’échantillon maître est nettement plus grand que celui-ci, surtout si je suis en train de faire un vêtement où il faut maîtriser la forme et la taille de façon très précise. Mais pour un petit quelque chose à porter autour du cou, ce petit échantillon était suffisant. L’échantillon maître est toujours très riche en enseignements sur les possibilités et les limites pour un projet.

Dans le cas présent, cet échantillon mesurait 11 x 13 cm = 143 cm2. Il pesait 9 g.

Je savais que j’avais au total 72 g de fil.

Cela voulait dire que je pouvais faire quelquechose avec le même fil, le même crochet et dans le même point, qui mesurait environ (143/9) x 72 = 1144 cm2.

Cela peut sembler beaucoup, mais ce chiffre mettait des limites très nettes à mes choix. Si j’avais voulu faire une écharpe large de 30 cm, la longueur totale maximale était 1144/30 = 39 cm. Ce n’est pas une écharpe, c’est un carré!

Si je voulais quelque chose à porter assez ajusté autour de mon cou, avec une petite patte de boutonnage (il était hors de question de nouer en raison de la quantité très limitée de fil), il faudrait que ce quelque chose fasse environ 50 cm de long.

Ceci veut dire que la largeur pourrait aller jusqu’à  1144/50 = 22.9 cm. Ceci m’a semblé une hauteur correcte pour un col qui pourrait se plisser entre la clavicule et le menton.

Comme j’ai décidé de boutonner le col (car là, j’étais assez certaine que ce serait un col), il me fallait gérer des boutonnières. Mon idée était de les intégrer dans le point, par exemple en supprimant la bride centrale dans quelques coquilles. Pour cette raison, et parce que les vaguelettes du bord supérieur de l’échantillon me plaisaient, j’ai décidé de crocheter le col d’un bout à l’autre, avec les coquilles « couchées » sur le côté. Le rang de démarrage (en bas de l’échantillon) qui n’était pas particulièrement joli serait caché par l’extrêmité du col qui viendrait se superposer à l’autre bout pour créer la patte de boutonnage.

Il fallait revenir à l’échantillon pour voir comment ces mesures pouvaient s’adapter au point. J’ai mesuré au milieu de mon petit échantillon, en sachant que mes mesures ne seraient peut-être pas tout à fait exactes (un échantillon plus grand, où vous pouvez mesurer une bonne partie tout en restant loin des bords, donne toujours un résultat plus précis).

Pour un col, une taille un peu plus grande ou plus petite n’est pas un souci – il faut juste avoir assez de fil pour finir.

Selon mes mesures 2 coquilles = env 6,5 cm de large.

Donc 1 coquille = 6,5/2 = 3,25 cm.

On peut donc mettre combien de coquilles sur un rang de 22,9 cm?
22,9/3,25 = 7,05.

C’était vraiment tout près d’un nombre rond, mais pour être tout à fait systématique j’ai recalculé la hauteur du col terminé avec ce nombre de coquilles:

7 x 3,25 = 22,75 cm. Top!

Donc, jusque là, pas trop de soucis. Mais l’histoire n’est pas finie…

A bientôt!

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